Et maintenant, on fait quoi ?

Témoignage d'un militant du NPA dans la lutte d'occupation des locaux de l'université de Nantes par les jeunes migrant.e.s.
Vendredi 1er décembre, froid hivernal.
En rentrant dans le bâtiment occupé, la chaleur vous accueille, le froid dehors rappelle pourquoi il faut se battre, ces jeunes ne doivent pas passer l’hiver dehors.
À 10h30 le président de l’université, Olivier Laboux, est entré dans la « zone occupée », accompagné de son équipe de conseillers. Ils visitent les salles, vérifient l’état des lieux et entrent dans la cuisine, alors que les jeunes et étudiants prennent encore leur petit déjeuner.

Le Président, qui n’était pas attendu avant 16h, s’est imposé dans la matinée, ne nous laissant pas le temps de préparer la réunion. On installe alors rapidement des chaises en arc de cercle dans la salle de réunion et quatre chaises sont mises au milieu, devant l’assemblée.

Le président et ses valets entrent et s’assoient. Posément, il expose et réaffirme sa position, qu’il dit « très ferme » sur le château et « tolérante » à propos de la Censive.

Ce qu’il entend par « très ferme »; c’est qu’il veut que nous quittions le château sur le champ.

« L’occupation du Château n’est pas acceptable, ce n’est pas tolérable pour la sécurité ».

Se faisant passer pour très compréhensif, tolérant et ouvert au dialogue, le président a beaucoup parlé, pour répéter ces choses, cette double position de tolérance et de fermeté.

Les étudiants réclament alors du concret, on demande une date, une sureté pour ces jeunes qui ne doivent pas vivre dans l’incertitude, sans savoir si demain, si la semaine prochaine ils seront toujours au chaud et le ventre plein, ou à la rue, dans le froid et la faim.

On demande aussi de nous ouvrir de nouvelles salles en bâtiment Censive, l’accueil devient compliqué, le nombre d’occupants atteint les limites de capacité de ces quelques salles au rez de chaussée.

Le château, un choix stratégique controversé.

Fort de symbole, le château semble être cher à la présidence, qui avait prévu d’en faire un lieu spécial à l’université, parlant de lui « redonner ses lettres de noblesse », voulant en faire un bel endroit pour accueillir des conférences, des colloque et autres réceptions.

Symboliquement, il est aussi cher à certains militants qui y voient un pied de nez fait à la Nantes esclavagiste, ce manoir bourgeois (plus qu’un château) a été construit par un marchand du commerce triangulaire.

Toutefois le château est éloigné du passage des étudiants, même s’il est à deux pas du campus, il n’est pas au coeur de la vie étudiante. Choisir un lieu isolé est stratégiquement compliqué à défendre. Ne nous égarons pas, la vraie bataille n’est ni sur le plan des symboles, ni sur le plan logistique, tous deux peuvent servir, ce sont des outils de lutte, mais ne sont pas la finalité de nos combats.

Donner un visage et un nom à ces jeunes.

En réunion après le passage du président on cogite sur ce qu’il nous demande, on soupèse ses menaces et coups de pression, est-ce du bluff ? Ce qui est sur c’est que nous pouvons être délogé, et nous ne pourrons rien faire contre, tout seuls.

« Il faut massifier le mouvement »

Ces jeunes, qui ont une histoire, un prénom, un nom, un visage, qui ne sont pas des « mineurs isolés », mais des jeunes en besoin de logement, d’éducation, de reconnaissance, de liens. Apprenons à les connaitre, intégrons-les à la vie de la fac.

Alors l’idée de parrainer des jeunes fait son chemin, que des classes, ou des groupes d’étudiants, des associations, apprennent à connaitre quelques jeunes en particulier, qu’ils créent du lien, qu’ils s’aident, se fassent découvrir des choses.

Le lien humain privilégié sera plus fort que des poubelles érigées en barricades lorsque la direction de l’université aura décidé que sa tolérance a des limites.